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5 questions pour comprendre les enjeux de l’élection partielle à Jean-Talon

5 questions pour comprendre les enjeux de l’élection partielle à Jean-Talon

Deux arts pas si différents. La politique et le théâtre cultivent de nombreux points communs. En témoigne le spectacle livré par certains candidats à l'élection partielle qui se tiendra le deux octobre prochain, dans la circonscription de Jean-Talon, à Québec.
Explications

Dans la circonscription de Jean-Talon, une élection partielle aura lieu le 2 octobre prochain / Crédit : La Tribune

Dans la circonscription de Jean-Talon, une élection partielle aura lieu le 2 octobre prochain / Crédit : La Tribune

1. Qu’est-ce qu’une circonscription électorale ? 

 

Une circonscription est un des 125 territoires géographiques qui divisent le Québec. Chacun d'entre eux permet à un candidat d’être élu député et de siéger sur les bancs de l’Assemblée Nationale du Québec. La sélection se fait au moyen d’un scrutin uninominal majoritaire à un tour. Une sémantique complexe pour un concept simple. Un seul tour est organisé, le ou la candidate en tête remporte la bataille. 


La circonscription de Jean-Talon comprend la partie de la Ville de Québec située dans l’arrondissement de Sainte-Foy–Sillery–Cap-Rouge. Son nom fait référence au premier intendant, nommé par Louis XIV en 1665, pour exercer des fonctions en Nouvelle-France.

En violet, les délimitations de la circonscription de Jean-Talon / Crédit : Jésus-eucharistie

En violet, les délimitations de la circonscription de Jean-Talon / Crédit : Jésus-eucharistie

2. Pourquoi une élection partielle est-elle organisée ?

 

Le 30 août 2019, le député de la circonscription de Jean-Talon, Sébastien Proulx, du Parti Libéral du Québec (PLQ), quitte ses fonctions. Il se retire de la vie politique et devient responsable institutionnel chez Desjardins, une coopérative de caisse populaire fondée en 1900


Dans la foulée de cette démission, Joëlle Boutin, du parti Coalition Avenir Québec (CAQ), obtient la confiance des électeurs pour briguer un premier mandat. Elle met ainsi fin au règne des libéraux sur la “forteresse” de Jean-Talon. Depuis sa création, en 1966, ces derniers se sont succédés à la gouvernance. Une rupture hautement symbolique, d’autant que Joëlle Boutin, ancienne pilote d’avion, est réélue à la suite des élections générales d’octobre 2022.

 

Un second mandat de courte durée. Au mois de juillet, Madame Boutin jette l’éponge, préférant se consacrer à sa vie de famille, où au secteur privé, qui sait ? C’est ainsi que les électeurs de la circonscription de Jean-Talon sont invités à se rendre aux urnes pour la quatrième fois en moins de quatre ans. Pour information, la durée d’un mandat pour une ou un député au Québec est de cinq année.


3. Quels sont les candidats en liste ?

 

Six principaux candidats sont actuellement missionnés pour participer à l’élection partielle dans la circonscription de Jean-Talon. Le Premier ministre du Québec, Jean-François Legault, appartenant au parti Coalition Avenir Québec (CAQ), a récemment officialisé la candidate qui portera les couleurs de sa formation politique. Il s’agit de Marie-Anik Shoiry, 44 ans, fondatrice et directrice générale de l’organisme Vide ta sacoche (distribution de produits hygiéniques pour les personnes vulnérables). 


Elle affrontera le candidat du Parti Québécois (PQ), Pascal Paradis, l’un des fondateurs d’Avocats Sans Frontières Canada. Entre ces deux formations politiques, les échauffourées ont débuté dès la semaine dernière (voir question 4), même si différentes ambitions sont affichées depuis un certain temps déjà. Dès la démission de Joëlle Boutin, Paul St-Pierre Plamondon, le chef du Parti Québécois (PQ), avait annoncé sur les réseaux sociaux vouloir “battre la CAQ à Québec”.

 

D’autres personnalités sont aussi dans la course. On y retrouve Jesse Robitaille, 24 ans, originaire de Calgary en Alberta, derrière le Parti conservateur du Québec (PCQ). Vient aussi Martine Ouellet, ancienne ministre des Ressources naturelles de 2012 à 2014, pour le parti Climat Québec. Aux dernières élections dans la circonscription de Jean-Talon, son parti n’avait récolté que 0,3% des voix, avec la candidature de Julien Cardinal. 


Du côté de Québec Solidaire (QS), le candidat Olivier Bolduc, arrivé second lors des dernières élections dans la circonscription de Jean-Talon, tentera à nouveau sa chance. Il a fait part de ses ambitions, quelques jours seulement après la démission de Joëlle Boutin. Enfin, les couleurs du Parti Libéral du Québec (PLQ) seront portées par Élise Avard-Bernier. Elle est notamment connue pour avoir fondé le site “Vie de Parents”, une plateforme numérique visant à répondre aux différentes questions liées à la parentalité.

 

4. Pourquoi parle-t-on à ce point de ces élections ?

 

L’incertitude quant aux résultats explique en partie l'engouement qui entoure ces élections. L'Histoire en est la preuve, la finalité des scrutins est imprévisible dans cette circonscription. En 1994, des élections générales ont lieu au Québec. Dans la circonscription de Jean-Talon, la candidate libérale Margaret F. Delisle l’emporte sur sa rivale, Diane Lavallée, avec seulement… 25 voix d’avance. Rebelote quatre ans plus tard. Cette fois, les libéraux (PLQ) conservent leur mainmise contre le Parti Québécois (PQ) grâce à une timide avance de 156 bulletins. 

 

D’un autre côté, l'électorat de la circonscription de Jean-Talon est assez singulier. Le journal La Tribune en dresse un portrait démographique. On y apprend que “48 % de la population de Jean-Talon détient un  baccalauréat ou un diplôme universitaire supérieur, contre 24 % pour l’ensemble du Québec”, ou encore que “la participation moyenne pour les trois dernières partielles dans cette circonscription était de 48 %”, alors même que, généralement, la population vote moins lors des élections partielles, comparativement aux générales (taux de participation de 37% pour les 10 dernières partielles au Québec). 

 

Cette fois pourtant, certains électeurs pourraient s'abstenir, en raison d’un mécontentement concernant le projet du troisième lien, aujourd’hui avorté (voir question 5). Énormément de paramètres vont donc influencer l'élection partielle du 2 octobre prochain.

 

Si l’on parle à ce point de cet épisode politique, c’est aussi en raison des différents rebondissements qui l'entourent. Dernier en date, les accusations de mensonge à l’égard de Jean-François Legault et son parti, Coalition Avenir Québec (CAQ), au sujet de ce fameux troisième lien, un projet autoroutier visant à relier Montréal et Lévis ( question 5). Lors de l’investiture du candidat Pascale Paradis, ce dernier a clamé : “On m’a dit : "Vous savez, le troisième lien, ça ne se fera pas, mais on ne parlera pas de ça pendant les élections, ça va être après". En clair, il a accusé le parti du Premier ministre d’avoir planifié la mort du projet autoroutier. François Legault s’est empressé de répondre à ces accusations, qu’il considère mensongères. «J’ai bien des défauts, mais pas celui d’être malhonnête», a-t-il lancé pour sa défense. Le Premier ministre assure que l’objectif du troisième lien ne sera pas abandonné. Ce projet fait du bruit depuis plusieurs années et l’opinion publique y est plutôt sensible. 

«J’ai bien des défauts, mais pas celui d’être malhonnête»

Jean-François Legault

En conclusion de ces accusations, il avait été révélé que Pascal Paradis avait flirté avec la CAQ, le parti de Jean-François Legault contre lequel il se présente aujourd’hui, lors des dernières élections générales de 2022. Des échanges avaient eu lieu, afin que l’actuel candidat du Parti Québécois porte les couleurs de la CAQ dans la circonscription de Charlevoix l’année passée. Selon les informations du média Radio-Canada, il aurait été jusqu'à “rencontrer la directrice générale du parti, Brigitte Legault, pour jeter les bases de leur association”. Un terrain d’entente n’a pas été trouvé. Reste que l’actuel candidat du PQ s’est justifié, expliquant que le parti du Premier ministre a pris l’initiative de l'approcher, et non l’inverse. Jean-François Legault a reconnu ces dires. 


5. Qu’est ce que le troisième lien ?


Un projet de tunnel routier visant à relier la ville de Québec et Lévis. Cette nouvelle infrastructure aurait notamment pour effet de désengorger les axes de transport. Les oppositions sont très nombreuses, jugeant que les coûts économiques et écologiques ne seraient pas justifiés.

Le tracé du troisième lien, reliant Québec à Lévis / Crédit : La Presse Canadienne, photo courtoisie

Le tracé du troisième lien, reliant Québec à Lévis / Crédit : La Presse Canadienne, photo courtoisie

En 2016, le Ministre des transports, Laurent Lessard, a commandé une étude de faisabilité au professeur de l’École polytechnique de Montréal, Bruno Massicotte. Conclusion : le projet serait “faisable techniquement”, pour un coût de quatre milliards de dollars. 

 

En 2021, François Legault et son ministre des Transports, François Bonnardel, présentent le projet. Un tunnel colossal : six voies de circulation,  8,3 kilomètres de longueur, 19,4 mètres de hauteur. Le tout intégré dans un projet plus large : le Réseau Express de la Capitale (REC), un vaste projet de transport, s’étendant sur dix ans. 

 

Les temps ont bien changé. Le 20 avril dernier, la ministre des transports, Geneviève Guilbault, avait annoncé que le projet aurait coûté entre 9,5 et 10 milliards de dollars. La portion autoroutière du projet a donc été abandonnée, privilégiant une voie consacrée aux transports en communs. Un camouflet, qualifié par certains médias “d’impuissance québécoise”

 

Jean Rémond